mardi 20 octobre 2015

UN GÉNIE OUBLIÉ



Saint-Jean et sa région, c’est bien connu, ont fourni au Québec de belles moissons de femmes et d’hommes notables.

Songeons à Rina Lasnier,
Rina Lasnier
 aux sœurs Grégoire
et à Yvonne Labelle en littérature puis à Honoré Mercier et Félix-Gabriel Marchand en politique, notamment.


Réputés de leur vivant, ces personnages ont bien souvent œuvré à bâtir eux-mêmes leur notoriété.

D’autres personnes, plus pudiques, ont préféré l’anonymat, même quand leur œuvre tenait au génie.

Ce fut le cas de Georges Edmond Tremblay, un sculpteur de première force à qui nous devons des œuvres inoubliables – mais souvent attribuées à autrui.

Né en 1878 à Cap-à-L’aigle, dans Charlevoix, G.E. Tremblay reçut sa formation au Vermont avant de s’installer dans la 9e avenue, à Iberville en 1907.

Là, son talent est vite remarqué par le grand sculpteur Alfred Laliberté, lequel décroche de nombreux contrats pour des monuments publics ou privés.

Le problème de Laliberté, c’est qu’il est très habile dans le modelage de ce qui deviendra statue de bronze, mais qu’il n’entend rien à la sculpture sur pierre.

Or, le granit et le marbre sont justement les points forts de Tremblay.

« À Laliberté le métal, à Tremblay la pierre. »

Ainsi naît une association de longue durée qui nous vaudra notamment la statue du Sacré-Cœur à Charlesbourg (1913), le monument de Dollard des Ormeaux à Carillon (1919) et celui de Dollard au Parc Lafontaine de Montréal (1920),
Parc Lafontaine

le monument du Curé Labelle à Saint-Jérôme (1924)
Bas reliefs ornant le piédestal de la statue du Curé Labelle à Saint-Jérôme
 


et le monument aux Patriotes au Pied-du-Courant à Montréal
ainsi que celui à Saint-Denis (1926).


Tous réalisés de concert avec Laliberté, on a tendance à les attribuer en totalité à ce dernier alors que la partie pierre – toujours excellemment réussie – est entièrement due à Tremblay.

Et son talent serait responsable de sa mort, car travaillant sans masque, il a été perpétuellement exposé à la poussière de ses matériaux.

Le 8 février 1939, à 61 ans, les poumons empoisonnés, il succombait à la silicose.

Difficile, de nos jours, de comprendre pourquoi un artiste si accompli a sombré dans un tel oubli.

Il est grand temps de le réhabiliter, en tout cas, et de lui réserver une place de choix dans notre panthéon.