mardi 27 septembre 2016

AU MOULIN



Automne 1878.


Au moulin McGinnis[1], à Saint-Athanase, en bordure du Richelieu, l’agitation est grande.  Les récoltes sont presque terminées et les paysans de la région sont venus porter leur grain à moudre.

C’est le moment d’échanger des nouvelles et des potins, de multiplier les plaisanteries et même de se livrer à d’énormes vantardises.

Pierre Cyr, par exemple, arrive tout juste de Saint-Cyprien et entend un groupe de hâbleurs en pleine discussion sur le nombre de minots de grain qu’un seul homme peut porter.

L’un avance huit minots, un autre va jusqu’à dix.

Pierre Cyr, lui, présente son fils de 15 ans, Louis,
Louis Cyr adolescent.
et affirme sans sourciller que celui-ci peut soulever quinze minots d’un seul coup.

Le pari est tenu et Louis se fait promettre les quinze minots s’il arrive vraiment à les soulever.

La place est vidée et balayée.  Une solide porte inutilisée est placée sur le dos de Louis qui s’est mis à quatre pattes et on y empile les lourds sacs, les uns après les autres.


Pari tenu.  Les 15 sacs s’y trouvent et Louis les maintient en place sans bouger.

Les badauds viennent d’assister là au premier tour de force de LOUIS CYR, celui qui, de nos jours encore, est considéré comme l’homme le plus fort du monde et dont nombre de tours de force n’ont jamais été égalés.

Celui-ci par exemple…


[1] Ce moulin, qui n’existe plus, était situé sur la rive droite du Richelieu à peu près vis-à-vis de l’emplacement actuel du collège des Maristes.  À noter qu’il reste dans l’eau les ruines du bief du moulin.

dimanche 25 septembre 2016

ÉDITION SPÉCIALE : FÉLIX-GABRIEL REVIENT CHEZ LUI.




En ce 25 septembre 2016 – 116 ans, jour pour jour après son décès – Félix-Gabriel Marchand est revenu chez lui, à Saint-Jean, sous forme d’une statue géante érigée tout juste à côté de son bureau de notaire, à l’angle des rues Jacques-Cartier nord et Saint-Jacques.


Car notaire, il était.


Il fut d’ailleurs le seul notaire – et même le seul Johannais – à devenir premier ministre du Québec (de 1897 à 1900).


Mais Félix-Gabriel ne fut pas seulement notaire et premier ministre, car rejetant l’étroite spécialisation à la mode de nos jours, il fut aussi cultivateur, journaliste, patron de presse (il a fondé le franco-canadien qu’il fusionnera ensuite avec le Canada Français), officier de la milice et conseiller municipal de Saint-Jean puis commissaire scolaire.


Comme premier ministre, il aura notamment remis en état les finances publiques gravement mises à mal par l’entrée en vigueur de la confédération canadienne et il aura aussi relancé la mise en valeur de nos ressources naturelles.


Par contre il a échoué à doter le Québec d’un véritable ministère de l’éducation, le clergé catholique et le conseil législatif (Sénat) s’étant ligués pour bloquer cette mesure avant-gardiste.


Roger Langevin
Toutes ces péripéties ont été rappelées lors de l’inauguration de la statue, due à l’art du sculpteur réputé Roger Langevin.


La cérémonie a été animée par
Dave Turcotte
le député de Saint-Jean Dave Turcotte, promoteur principal de cette initiative.

Deux arrière-petites-filles de Félix-Gabriel s’étaient même déplacées pour participer à la cérémonie.
Arrière-petites-filles de Félix.

Y participaient aussi nombre de notables,
dont évidemment le maire Michel Fecteau et notre présidente – Nicole Poulin – invitée à couper le sacro-saint ruban bleu.


Longue vie à ce nouveau lieu de mémoire.


Mais… n’oublions pas que Sabrevois (ex-Saint-Athanase) n’a pas de statue d’Honoré Mercier, l’un de nos plus grands premiers ministres…




mardi 20 septembre 2016

QUAND SAINT-JEAN ÉTAIT AUX MAINS DE FORBANS.



    Dès la conquête britannique, des officiers des forces d’occupation entreprirent de s’enrichir rapidement en exploitant les ressources locales.
 
C’est ainsi que Moses Hazen, lieutenant à la retraite,
Gabriel Christie
s’associe avec le lieutenant-colonel Gabriel Christie pour acheter conjointement les seigneuries de Sabrevois et de Bleury, sur la rive droite du Richelieu, de même que cinq fermes dans le territoire de la future ville de Saint-Jean.


Gabriel Christie est l’intendant général des troupes britanniques en Amérique du nord et est chargé à ce titre, d’assurer toutes les fournitures militaires nécessaires.


Il connaît notamment les immenses besoins en bois de la marine et sait lui vendre à bon prix le bois de ses propres forêts.


Quant à Hazen, il se fait nommer « sous-inspecteur des forêts du roi » et se lance aussi, comme un forcené, dans le commerce de la matière ligneuse.


Mais, encore plus pressé que Christie, il vend du bois prélevé sur les terres de ses voisins…


Il subit alors la première d’une fort longue série de poursuites judiciaires.


Il a aussi la manie de se fortement endetter sans trop se soucier de ses capacités de remboursement, de telle sorte qu’en 1770, son complice Christie décide de demander une séparation de leurs biens.


Hazen conserve la partie de leurs terres sises au Fort Saint-Jean et devient seigneur de Bleury-sud, juste à temps pour subir deux séries de saisies qui verront une bonne partie de ses biens vendus aux enchères.


Avec l’éclatement de la révolution américaine, il décide de se joindre aux insurgés, jugeant qu’il a de meilleures chances de conserver les biens qui lui restent en cas de victoire.


Grave erreur :  la révolution réussit, mais les Britanniques restent au Canada…


Son ancien co-seigneur Gabriel Christie, aussi âpre au gain que lui, en profite pour faire saisir ses propriétés du Haut-Richelieu, dont Bleury-sud et les fermes à Saint-Jean, puis les rachète à vil prix.


Aux États-Unis, Hazen continue de s’endetter sans compter et est l’objet de 14 nouvelles poursuites judiciaires au cours des dernières années de sa vie.


En 1802, il est officiellement déclaré fou par le tribunal et meurt quelques mois plus tard.


Quant à Christie, il devient à la longue seigneur de toutes les seigneuries du Haut-Richelieu, rive gauche et rive droite.


Il perd cependant les seigneuries dont il était titulaire dans ce qui devint les États-Unis, seigneuries qui sont confisquées... mais pas par Hazen.


Il meurt en 1799 sans voir fini le manoir qu’il se faisait construire à Chambly.
Manoir Christie à Chambly.  Il fut détruit par un incendie en 1953


mardi 13 septembre 2016

À LA GRANDE FOIRE




En ce magnifique mois de septembre 1896, la grande foire agricole de Saint-Jean a attiré comme d’habitude un énorme chaland.


Tout ce que la région qui s’étend du comté de Rouville à celui de Beauharnois compte d’agriculteurs et de curieux s’est rassemblé durant quatre jours dans la grande ville pour prendre le pouls de l’agriculture moderne.


Les expositions de chevaux et de bovins, sans oublier les moutons, les porcs et les poules,  ont particulièrement
retenu l’attention des éleveurs, toujours à l’affût des races les plus productives ou les plus en demande.


Tous les autres produits de la ferme ont également pu piquer la curiosité.


On a toutefois noté une baisse dans la quantité, heureusement compensée par une hausse sensible de la qualité.



Par ailleurs, aucune bonne foire ne se limite à la production strictement agricole et les fermières étaient à nouveau nombreuses, cette année, pour exposer le fruit de leur talent et de leur patience :  tout un chacun pouvait régaler ses yeux en admirant les magnifiques courtepointes, les habiles tricots et les délicates broderies.


En complément de programme, on avait même prévu des trapézistes, une troupe de danseurs indigènes et une dompteuse de lions ; de quoi fouetter l’intérêt des plus blasés.

Tout le monde y aura trouvé son compte.